Mis à jour le 18 avril 2024Les fragilités, Psychique

Quand le travail détruit : combattre le burn-out

Comme une bête insidieuse qui vous ronge lentement avant de vous terrasser, le burn-out professionnel est le résultat des organisations du travail défaillantes qui placent les employés dans des situations intenables, jusqu'à ce qu'ils atteignent leur limite, que leur esprit et leur corps cèdent. Définir le burn-out est une tâche complexe, car ce syndrome est étroitement lié aux structures de travail, qui sont en constante évolution. Cependant, le comprendre peut être une ressource précieuse à une époque où l’attractivité des métiers est en jeu et le recrutement difficile.

Dans la onzième révision de la classification internationale des maladies, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) décrit le burn-out ou l’épuisement professionnel. C’est « un syndrome conceptualisé comme résultant d’un stress professionnel chronique qui n’a pas été géré avec succès. Il se caractérise par trois dimensions : des sentiments d’épuisement ou de fatigue, une distance mentale accrue par rapport à son travail ou des sentiments de négativisme ou de cynisme liés à son travail, et un sentiment d’inefficacité et de manque d’accomplissement ».

Pour Marie Pezé, docteure en psychologie, psychanalyste et ancienne experte judiciaire, fondatrice et responsable du réseau Souffrance et Travail, le burn-out, est un mot valise « qui existe essentiellement parce qu’on met sous cet intitulé toutes les pathologies associées au travail.» Elle précise  : « Nous sommes en face de pathologies organisationnelles liées à l’environnement de travail ». Le burn-out est conceptualisé comme un syndrome résultant d’un stress professionnel chronique mal géré. Il se caractérise par trois dimensions : des sentiments d’épuisement ou de fatigue, un détachement mental vis-à-vis du travail ou des sentiments de cynisme, et un sentiment d’inefficacité et de manque d’accomplissement.

Le burn-out est classé dans la catégorie des « problèmes liés à l’emploi ou au chômage ». L’OMS précise qu’il se réfère spécifiquement à des phénomènes dans le contexte professionnel et ne devrait pas être utilisé pour décrire des expériences dans d’autres domaines de la vie. Avec les services publics confrontés à des défis tels que l’inflation et l’optimisation des dépenses de personnel, quelles stratégies les agents peuvent-ils adopter pour se protéger dans cet environnement professionnel difficile ? Comment peuvent-ils aborder le burn-out pour se préserver et soutenir leurs collègues ?

L’origine du burn-out remonte aux années 1970 avec Herbert J. Freudenberger, psychothérapeute américain. À l’époque, ce terme était utilisé par les médecins psychiatres pour décrire l’état d’épuisement émotionnel et mental des soignants s’occupant de patients toxicomanes. Freudenberger le considérait comme une maladie affectant les psychiatres idéalistes trop investis émotionnellement dans leur travail.

Pour Marie Pezé, le terreau du burn-out réside dans la surcharge de travail et l’incapacité à bien accomplir ses tâches, ainsi que dans l’intensification du travail. Elle souligne également les conséquences néfastes des modes de travail dégradés, caractérisés par une prolifération excessive de procédures et un manque de sens dans les tâches effectuées. Selon elle, les réorganisations constantes des services sans embauche supplémentaire contribuent également à ce phénomène en transformant les employés compétents en novices permanents.

Le burn-out contemporain est alimenté par les nouvelles normes du monde du travail, caractérisées par une procéduralisation accrue des tâches et des attentes de performance constantes, souvent exacerbées par l’utilisation des technologies numériques. La personne en proie au burn-out n’a plus le luxe de prendre du recul ou de communiquer avec ses pairs. Les collectifs de travail se désintègrent, la confiance diminue et l’isolement s’installe.

Les chiffres de l’enquête Conditions de travail et risques psychosociaux montrent qu’en 2016, au moins 57 % des salariés étaient exposés à trois dimensions ou plus des risques psychosociaux, et 4 % à six dimensions simultanément. Ces dimensions comprennent l’intensité du travail, les exigences émotionnelles, l’autonomie, les relations sociales au travail, les conflits de valeurs et l’insécurité de la situation de travail.

Le burn-out est un mal insidieux qui résulte de divers facteurs liés à l’organisation du travail moderne. Comprendre ses mécanismes est crucial pour prévenir son apparition et soutenir ceux qui en sont victimes. Pourtant dès le début des années 80 que les contours du burn-out sont définis par les travaux scientifiques. Qu’avons-nous fait pour en arriver là ? Ou plutôt que n’avons-nous pas fait ? Au cours de ses recherches et enquêtes sur l’organisation et la santé au travail, Claire Edey Gamassou, enseignante-chercheuse en management, a poussé la porte d’une kyrielle de collectivités. Et tiré un certain nombre d’enseignements issus de ses rencontres avec les territoriaux.

Selon les experts, une organisation peut générer du burn-out soit par une structure défaillante entraînant une surcharge et un manque de coopération, soit par des difficultés individuelles non identifiées et non traitées. Ainsi, la responsabilité de la prévention du burn-out incombe à l’employeur et au management, qui doivent prendre en compte tous les facteurs de risque, y compris les dimensions psychosociales. Les cadres jouent un rôle crucial dans la prévention du burn-out en offrant un soutien aux employés, mais ils doivent également être soutenus par l’organisation elle-même. La prévention du burn-out nécessite donc une approche globale, prenant en compte tous les risques potentiels pour la santé au travail.

Bien que des avancées aient été réalisées dans la prévention de la santé au travail, notamment avec des outils juridiques comme le document unique d’évaluation des risques professionnels, le burn-out n’est pas encore reconnu comme une maladie professionnelle caractérisée. Cela pose des défis pour les travailleurs qui cherchent à faire reconnaître leur souffrance au travail. Le télétravail, bien qu’il offre des avantages en termes de flexibilité, peut également augmenter le risque de burn-out en réduisant les interactions informelles et en accroissant la charge de travail liée à l’organisation des échanges. Les effets physiques du travail sur écran et la sédentarité sont également des facteurs à prendre en compte.

Malgré ces défis, il y a de l’espoir pour une meilleure prévention du burn-out, notamment à travers des initiatives variées dans la fonction publique et des approches innovantes telles que le « travail de santé » adopté par certains travailleurs atteints de maladies chroniques. Cependant, il reste nécessaire de continuer à développer des stratégies efficaces pour prévenir le burn-out et promouvoir la santé au travail de manière globale.

À propos de cet article

Source :
La lettre du cadre territorial

Publié le 24/05/2023

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