12 juin 2023Les fragilités, Psychique

Conflits de valeurs au travail : quels liens avec la santé ?

Pénibilité, manque de moyens, désaccord éthique… Quand ses convictions personnelles se heurtent aux missions liées à son travail, on parle alors de “conflit de valeur”. La Dares (Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques) aborde cette question dans l’étude qu’elle a consacré aux conditions de travail et aux risques psychosociaux. Ses conclusions vont dans le sens des chiffres de l’Assurance maladie. Quel est l’impact de ces conflits sur la santé ? Quelles sont les catégories professionnelles les plus concernées ?

60% des actifs occupés signalent être exposés à des conflits de valeurs dans leur travail.

Dans le cadre de sa grande enquête “Conditions de travail et Risques psychosociaux” réalisée en 2016, la DARES a posé une série de questions sur les conflits de valeurs. En mai 2021, elle a publié une analyse à ce sujet : “Conflits de valeurs au travail : qui est concerné et quels liens avec la santé ?” Parmi les facteurs de risques psychosociaux identifiés au travail, les conflits de valeurs émergent. Pourtant, ils restent encore peu étudiés.

De quoi parle-t-on exactement ? Les conflits de valeurs sont définis comme “l’ensemble des conflits qui portent sur des choses auxquelles les travailleurs octroient de la valeur : conflits éthiques, qualité empêchée, sentiment d’inutilité du travail, atteinte à l’image du métier”.

Si 40 % des travailleurs ne sont que peu ou pas concernés, cinq profils d’exposition se distinguent parmi les 60 % restants :

  • 18 % rencontrent des conflits éthiques même s’ils ont les moyens de travailler correctement,
  • 12 % éprouvent la fierté du travail utile et bien fait, malgré l’insuffisance des moyens,
  • 11 % ressentent leur travail comme inutile même s’ils disposent de moyens pour l’accomplir,
  • 8 % estiment que leur travail manque de sens et de qualité,
  • 11 % cumulent les différents aspects des conflits de valeurs.

Surexposés, ces derniers estiment presque tous (98%) “ne pas pouvoir faire du bon travail” et devoir “sacrifier la qualité”. Ils sont aussi les plus nombreux à devoir faire des choses qu’ils désapprouvent (96 % contre 61 % en moyenne), ou encore à prendre des risques pour leur santé mentale et physique ou pour celles de patients ou d’usagers.

Au sein de ce groupe surexposé aux conflits de valeurs, on compte davantage de femmes, de personnes de 31 à 50 ans, de professions intermédiaires de l’enseignement, de la santé, d’employés de la Fonction publique, ainsi que de salariés en CDI ayant des craintes pour leur emploi.

Ces personnes travaillent plus souvent en contact avec le public que la moyenne et sont davantage victimes d’agressions verbales ou physiques. De plus, 73 % d’entre elles continuent à penser à leur travail en dehors de son lieu d’exercice (contre 41 % pour l’ensemble des actifs occupés). Ces situations sont particulièrement fréquentes parmi les infirmiers et sages-femmes, les aides-soignants, les enseignants, les personnels de l’armée, de la police ou les pompiers mais aussi les employés des banques et assurances ou encore les caissiers.

Les conflits de valeurs ont un impact sur la santé

Les travaux, menés notamment en clinique ou en psychodynamique du travail, montrent que les conflits de valeurs peuvent être sources de souffrance psychique chez les travailleurs. Dans les cas extrêmes, la souffrance éthique peut amener au suicide, en particulier dans des situations d’isolement.

L’enquête a ciblé deux facteurs : la perception d’un mauvais état de santé et les troubles du sommeil. Les salariés surexposés sont ceux qui déclarent le plus de problèmes de santé : 47 % d’entre eux pensent que leur état de santé est mauvais et 43 % ressentent des troubles du sommeil (contre respectivement 17 % et 18 % pour les non ou peu exposés). Se situent ensuite à un niveau quasi identique le groupe dont le travail manque de sens et de qualité (31 % et 30 %) et celui qui rencontre des conflits éthiques (29 % et 30 %). Les deux derniers groupes ont des atteintes plus limitées.

Les détériorations touchent également la santé mentale, à des niveaux différents selon les types de conflits de valeurs. Si, en moyenne, 10 % des actifs occupés souffrent d’un syndrome dépressif, les taux oscillent entre 4 % pour les actifs peu exposés à 26 % pour ceux qui sont surexposés, avec y compris des idées suicidaires pour 13 % d’entre eux.

 

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Source :
vie publique

Par Direction de l'information légale et administrative

Publié le 14/06/2021

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