Jean-Marc, la cinquantaine, est infirmier aux urgences au sein de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) depuis plus de vingt ans. Il a choisi cette profession par vocation et, durant ses premières années, il y trouvait pleinement son épanouissement. Mais avec le temps, les conditions de travail se sont dégradées. Il ne se reconnaît plus dans un hôpital public qu’il juge devenu « mercantiliste », focalisé sur les chiffres au détriment des soins. Il dénonce un quotidien éprouvant : des collègues infirmiers contraints de prendre en charge plus de vingt patients par jour, des services où cinq soignants doivent accomplir le travail de dix. À l’épuisement physique s’ajoute une pression psychologique croissante. Conscient des risques pour sa santé, il veut éviter d’atteindre un point de non-retour.

« Ma décision est prise depuis un an : je veux partir. Qu’est-ce qui pourrait me retenir ? »
« J’étais fier de travailler pour l’hôpital public, là où se fait la grande médecine. C’est ici qu’on avance techniquement, qu’on innove.
On est fier quand quelqu’un arrive aux urgences dans de mauvais draps, puis repart en bien meilleur état, en nous adressant un grand merci. »
« Mais en quelques décennies, tout a changé. Aujourd’hui, c’est tout l’inverse, vu notre charge de travail, on court partout, les patients nous accusent d’être lents, ils nous critiquent, pointent les dysfonctionnements. »
« Au bloc, je suis seul et j’ai pourtant la responsabilité de la sécurité, de l’hygiène, de tout un tas de choses, c’est infernal. »
« On est devenus des machines. Les conditions de travail sont exécrables. »
« On se sent totalement dévalorisés. Le risque, c’est l’épuisement professionnel. »
« J’adore mon métier, mais je ne veux pas laisser le travail me pourrir la vie. »
Son avenir professionnel reste incertain. Faut-il démissionner pour se lancer en libéral, rejoindre le secteur privé ou chercher un poste plus serein dans un autre établissement public ?
Il explore toutes les options, sans s’imposer de limites.
Père de deux enfants, il perçoit 1 990 euros nets par mois et ne redoute pas de quitter la « sécurité » de l’emploi. Dans son domaine, le travail ne manque pas – c’est plutôt la qualité des conditions qui fait défaut.
« Il ne faut pas se leurrer, si les agents partent, ils ne le feront pas pour le chèque, mais parce qu’ils sont sur les jantes. Moi, je n’attends rien de Macron. Je m’en irai, avec ou sans indemnité de départ. »
Source : Liberation.fr